Fournisseurs d’accès internet, clouds, systèmes d’exploitation et plateformes en ligne sont autant de services numériques qui sont devenus incontournables. Ils sont proposés en grande majorité par des acteurs américains qui ont acquis une position de quasi-monopole sur le marché du numérique
Dans notre dossier thématique « Résilience numérique », nous vous proposons 6 articles pour définir le cadre de notre Résilience Numérique ainsi que ses enjeux et composantes. Dernier article de notre dossier Résilience numérique consacré à la résilience de nos réseaux numériques, cet article fait suite à la présentation des six enjeux clés de la Résilience Numérique.
Les avancées technologiques des dernières décennies ont conduit à une multiplication des services en ligne et à une augmentation du volume de données disponibles. Fournisseurs d’accès internet, clouds, systèmes d’exploitation et plateformes en ligne (moteurs de recherche, marketplaces, réseaux sociaux…) sont autant de services numériques qui sont devenus incontournables. Ils sont proposés en grande majorité par des acteurs américains – dont les plus puissants sont appelés les GAFAM – qui ont acquis une position de quasi-monopole sur le marché du numérique
La règlementation européenne pour protéger les données des utilisateurs
En réaction à cette montée en puissance de ces acteurs étrangers, l’Union Européenne a entrepris un travail de réglementation visant à limiter les abus et à protéger les données des utilisateurs.
- Le Digital Markets Act (DMA) par exemple, vise à lutter contre les pratiques anticoncurrentielles des géants du numérique et à stimuler l’innovation pour faire émerger des petites et moyennes entreprises et des start-up européennes. Le DMA obligera les entreprises à rendre interopérables les fonctionnalités de base de leurs services, notamment de messagerie (Messenger, Whatsapp…) avec leurs concurrents.
- Le Digital Services Act (DSA), quant à lui, vise à rendre illégal en ligne ce qui l’est hors ligne. Il obligera les plateformes à plus de transparence sur leurs politiques de modération et sur le fonctionnement de leurs algorithmes. Le non-respect de ces deux règlements sera sanctionnable à hauteur de 6 à 10% du chiffre d’affaires global des entreprises.
- Le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) de son côté renforce le droit des individus sur leurs données personnelles et défini un cadre légal pour la collecte et l’utilisation de ces données.
- Enfin, le Digital Operational Resilience Act (DORA) vise à renforcer la résilience opérationnelle numérique dans le secteur financier.
Les risques liés à ces règlementations européennes
La volonté ferme de l’UE de construire une réglementation du numérique en Europe s’accompagne de certains risques.
- Tout d’abord, l’Union Européenne pourrait rencontrer des difficultés à faire appliquer ses réglementations. Les géants américains pourraient alors continuer de fonctionner avec leurs propres standards et conserver leurs pratiques anticoncurrentielles en contournant ou en ignorant la règlementation européenne en toute impunité. Des acteurs européens auraient par conséquent du mal à émerger et le projet de réglementation serait un échec.
- D’autre part, les géants américains pourraient se conformer aux nouvelles réglementations européennes mais au risque de perdre en qualité de service et en sécurité pour les utilisateurs. Effectivement, les réglementations pourraient contraindre les entreprises à détériorer leurs algorithmes pour les rendre plus transparents et moins puissants, ou à altérer la confidentialité des données pour assurer une interopérabilité.
- Enfin, les intermédiaires en ligne américains pourraient se montrer frileux face à des règles européennes trop contraignantes et néfastes pour leur chiffre d’affaires. Ils décideraient alors de se rétracter complètement du marché européen, privant ainsi les utilisateurs européens de services numériques d’une qualité pour l’instant inégalée en Europe.
Les actions au niveau Européen peuvent favoriser l’émergence et le développement d’acteurs indépendants en renforçant les outils limitant les abus de position dominante
Les actions d’envergure nationale demandent un équilibre fin pour éviter les effets d’évictions, et ne pas contribuer à la fragmentation déjà importante du marché européen.
- Les actions au niveau Européen ont l’avantage de pouvoir façonner un marché plus fluide. En alignant les exigences clients grâce au développement de référentiels et de réglementations, qui rendent obligatoire le développement d’offres localisées et résilientes pour attaquer le marché européen et qui pourraient être étendues à d’autres secteurs.
- Les actions au niveau Européen peuvent favoriser l’émergence et le développement d’acteurs indépendants en renforçant les outils limitant les abus de position dominante et en élevant les exigences portant sur l’interopérabilité et la réversibilité.
Il faut s’attendre à une résistance des leaders du marché, pour qui les intégrations verticales et horizontales, les effets de réseaux, et les lock-in font partie intégrante des solutions et du business model. L’Europe peut aussi appuyer le développement de marchés de financement d’envergure européenne (IPO, VC) afin de permettre à ses champions de grandir en restant sur son sol, et favoriser le foisonnement et l’émergence de talents de la recherche par des dispositifs de type « Fast Grant ».
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