Savoir gérer les risques contractuels, c’est savoir anticiper et éviter les pertes financières dues à un acheteur qui n’honore pas un contrat ou à l’entreprise qui ne gère pas correctement les obligations et bénéfices contractuels.
Anticiper et maîtriser les risques contractuels ne s’improvise pas et vous donne quelques clés.
Sommaire
La gestion des risques contractuels et le mythe de Sysiphe
Infatigable Sysiphe ! En tant que Project Manager ou Contract Manager, vous avez sans doute déjà fait le constat douloureux d’un planning qui dérive. Sans parler d’une qualité de réalisation qui se détériore et, finalement, d’une performance économique qui s’éloigne des attendus au fur et à mesure que le projet avance.
Pourtant, vous avez déployé des moyens importants pour contrecarrer les mauvaises nouvelles et pour redresser la trajectoire. Mais en vain : la performance économique n’est pas au rendez-vous, vous avez l’impression que « quelque chose » vous a échappé. Vous restez alors sur cette sensation désagréable de ne pas avoir maîtrisé la succession d’événements à l’origine de cette situation.
N’avez-vous jamais rêvé de mieux comprendre pourquoi « tant de difficultés » ? Et rêvé, aussi, de mieux anticiper ces risques contractuels, de mieux les maîtriser ?
Si cela vous parle, alors lisez la suite, cet article est fait pour vous !
Rembobinons le film de la gestion des risques contractuels : le diable se cache dans la complexité
Pourtant il est facile de reconnaître des projets complexes
- Ils font intervenir, en interface, une multitude d’acteurs aux intérêts souvent divergents.
- Ils mettent en jeu des dizaines - voire des centaines - de contrats différents qu’il faut synchroniser, avec le risque que les défaillances de l’un rejaillissent sur l’autre
- Malgré la connaissance accumulée et l’expérience en management de projet, l’environnement réserve parfois des surprises en raison de facteurs exogènes au projet.
Piloter des projets complexes ne s'improvise pas !
Soyons clairs, piloter un projet ou un contrat complexe qui comporte autant d’interfaces, de paramètres, de contraintes qu’il faut prendre en compte simultanément, ne s’improvise pas !
Les risques de dégradation de la performance (coût/qualité/délai) sont donc très nombreux. Ils prennent souvent racine dans la préparation ou dans l’exécution des contrats.
Ainsi, par exemple, une contractualisation hâtive, l’imposition de nouvelles exigences de la part du client, les modifications de projet ou la défaillance du suivi d’exécution auront des répercussions néfastes, d’autant plus si le contractant est pugnace, opportuniste ou en situation de marge « serrée ».
Les exemples ne manquent pas
- La construction du tunnel sous la Manche. Projet qui s’est soldé par un surcoût de 75% et un retard d’un. Quelle en est la cause ? L’effet cumulé de la signature prématurée du contrat de travaux, de l’ajout de nouvelles exigences en cours de route et de l’opportunisme contractuel du constructeur.
- Le CHSF (Centre Hospitalier Sud-Francilien). Le bail emphytéotique a été finalement résilié à cause, entre autres, des milliers de malfaçons dont certaines furent si graves qu’elles retardèrent de plusieurs mois l’accueil des patients.
- Les JO d’Athènes. De nombreuses infrastructures de transport furent construites mais 90% des sites sportifs ont été abandonnés après les Jeux. Or, ces constructions dont le coût ne fut pas toujours bien maîtrisé, avaient gonflé la dette publique grecque de 2 à 3%.
Le résultat : une dégradation majeure de la performance (coût / qualité / délai)
Ces grands projets ont tous en commun d’avoir subi, à un moment donné, un ou plusieurs événements qui ont provoqué des perturbations en cascade pour aboutir in fine à une dégradation importante de la performance (coût/qualité/délai).
Maintenant que ces projets sont terminés, osons cette question « post-mortem » : aurions-nous pu éviter l’enchaînement des événements ? Si oui, comment ?
Pour gérer les risques contractuels, commençons par un voyage au cœur du management des risques…
Traditionnellement, l’équipe projet liste des dizaines de risques opérationnels puis les analyse un par un de façon statique. Cette analyse a pour objectif d’anticiper et de maîtriser les effets directs de ces risques.
Toutefois, elle omet les liens de cause à effet entre les risques. Or, ces liens vont générer des effets indirects et des réactions en chaîne. Ils peuvent alors conduire à un effet d’emballement du projet et à une situation qui devient difficilement contrôlable.
Nous voyons donc ici que la méthode traditionnelle de management des risques n’est pas suffisante pour étudier la dynamique d’emballement. Néanmoins, elle demeure nécessaire pour bien connaître chaque risque individuellement et prioriser l’action sur les risques les plus critiques.
La solution est l'identification en amont des liens entre les risques. Mais comment faire ? Est-ce possible et pertinent de relier les risques entre eux sans ajouter une complexité supplémentaire ?
Le cadre d’analyse des risques doit être complété !
- Définir un ensemble de facteurs de performance contractuelle. Ces facteurs sont génériques, transposables d’une organisation à une autre. Ils sont en nombre limité pour restreindre la complexité d’analyse et permettre une prise en main aisée.
- Analyser la dynamique de propagation entre les facteurs et leurs répercussions sur les risques opérationnels.
Un cadre d'analyse des risques à deux niveaux (risques opérationnels et risques contractuels)
Notre cadre d’analyse repose donc sur deux niveaux de gestion des risques. Niveau inférieur : les risques opérationnels et niveau supérieur : les facteurs de performance contractuelle.
Par rapport à une longue liste qui peut contenir plusieurs dizaines voire des centaines de risques opérationnels, notre modèle ne compte qu’une vingtaine de facteurs de performance contractuelle. Cette méthodologie nous permet d’analyser les liens d’interdépendance sur une matrice plus facilement gérable.
Par ailleurs, les facteurs de performance contractuelle que nous avons identifiés sont suffisamment génériques pour s’appliquer à tous les secteurs d’activité.
Cas pratique de la gestion des risques contractuels : l’analyse des chaînes de propagation
Une fois que les liens risques-facteurs et les liens entre facteurs sont cartographiés, nous pouvons tracer les chaînes de propagation.
À partir d’un risque origine (ici le n° 178), on repère le facteur immédiatement impacté (qualité de la gouvernance pendant l’exécution contractuelle). Puis on propage pas à pas sur les autres facteurs (rectangles noirs), en repérant pour chaque facteur quels sont les risques associés.
La visualisation de ces chaînes met en lumière :
- Des liens non évidents a priori entre des causes et des effets qui sont éloignés les uns des autres. Par exemple, une mauvaise gestion des contrats peut entraîner des erreurs de plans.
- Un « chemin » ou enchaînement à forte occurrence ou impact, sur lequel on peut déployer ensuite des stratégies classiques de gestion des risques.
Gérer les risques contractuels à chaque phase
Les résultats produits jusqu’à présent sur des cas réels tendent à valider la pertinence de notre cadre de travail, qui est utilisable à tout moment de la vie d’un contrat.
- En amont de la signature du contrat, pour anticiper des risques indirects qui pourraient se produire soit pendant la contractualisation, soit pendant l’exécution, là où les impacts sont à des échelles beaucoup plus grandes.
- En phase d’exécution, pour diagnostiquer la situation d’un projet ou d’un contrat et déboucher sur la priorisation d’actions de traitement.
Notre méthode a par ailleurs été appliquée avec succès pour l’analyse post-mortem d’un projet de construction et a confirmé la possibilité de détecter, très en amont, des signaux faibles dont la mise sous contrôle aurait sans doute permis de mieux anticiper, donc prévenir, la survenance de risques majeurs.
Contract Management
Franck CÉSAR
Associé iQo
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